Samedi 22 juillet 2017.

Selon le plan initial, je devrais rentrer en France demain ! C’est presque inconcevable. Je ne suis qu’en Bolivie. Mon quatrième mois dans ce pays s’achève et je mesure tout le chemin parcouru depuis mon départ de France, il y 9 mois. 9 mois d’expériences intenses et de rencontres incroyables. Uruguay, Chili, Argentine, Bolivie, j’ai parcouru plus de 20 000 km, en avion, en bus, en auto-stop, en moto-stop, en camion, en bateau, en quad ou en patin à roulettes.

Crédit : Raphaël Beauman

J’ai perdu une veste, une paire d’écouteurs et trois petites petites culottes. J’ai brulé une chaussette, troué une paire de chaussure, une chemise, deux tee-shirt et trois pantalons.

J’ai dormi, à trois, dans l’unique pièce d’une maison de terre, dans le lit confortable d’un appartement luxueux, dans la tour de contrôle abandonnée d’un aéroport, dans une mairie, dans une cabane de garde-forestiers, dans une maison entièrement construite à partir de matériaux recyclés, sur un bateau, dans ma toile de tente et dans une yourte.

J’ai vu des colibris, des perroquets, un puma, des alligators, des singes, des piranhas, des dauphins, des baleines, des lamas et de nombreux oiseaux évoluer dans leur environnement naturel.

singe d’Amazonie

J’ai bu de l’eau d’un arbre, mangé des patates déshydratées, des algues, un ver blanc visqueux, des piranhas et d’autres plats parfois étranges.

J’ai bu du maté, mastiqué de la coca, fumé de l’herbe dans une patate et participé à une cérémonie chamanique d’Ayahuasca.

J’ai vécu des aventures amoureuses complètement folles, joué dans un groupe de musique, vendu des crêpes dans la rue, randonné plusieurs jours seule ou avec des compagnons rencontrés par hasard et réveillonné au pied du mont Fitz Roy. J’ai participé à la construction d’une maison écolo en forme d’escargot, vécu dans des communautés indigènes, été invité à deux mariages et à célébrer la première année de la mort de quelqu’un …

La liste des expériences réalisées pour la première fois de ma vie s’allonge chaque jour et je mesure à quel point voyager me rend heureuse et libre. Libre de ne dépendre de personne, ni d’un petit ami avec qui il faudrait faire des compromis, ni d’une entreprise pour laquelle je devrais travailler pour vivre. Libre de dire oui ou non et de m’embarquer dans n’importe quelle aventure. Certes, j’ai travaillé pour cela et je veille chaque jour à ce que mes économies ne fondent pas trop vite afin de profiter encore longtemps de cette liberté. Tout est possible, chaque jour est différent. C’est quelque chose de grisant, un sentiment difficilement descriptible, de voir que tous mes rêves se réalisent les uns après les autres, sans limite. Chaque jour est plus surprenant, plus incroyable que le précédent et les rencontres s’enchaînent dans des circonstances inimaginables. Les situations critiques se transforment souvent en bonheurs inespérés. C’est comme si tous les Niens (esprits de chaque chose chez les Mapuche) s’étaient mis d’accord pour que mon chemin ne croise que celui de gens bien. Comme si toutes les énergies convergeaient dans une même direction pour que les rêves se réalisent.

Réunion au sommet – Altiplano bolivien

J’ai partagé le quotidien de gens qui n’ont pas grand chose mais partagent tout, généreusement. J’ai rencontré des personnes ennuyantes mais beaucoup plus de gens passionnants. Certains m’ont fait des confidences très intimes et d’autres m’ont profondément bouleversée et ont marqué un virage dans ma vie. Carlos, Eric, Miguel, Tania, Nadia, German, Ginette, Juana, Carolina, Julian, Alfonso, Hector, Walter, Paula, Leandro, Felipe, Belen …. merci de voir le monde avec d’autres yeux, de vouloir le changer et de vous en donner les moyens. Je suis fière de vous avoir rencontré.

Ginny, Grant, Ludo, Raphaël, Joël, Valentin, Francisco, Audrik, Noëmie, Milton … comme moi, vous ne voyagez pas seulement pour cocher des cases dans une liste mais pour vivre la vie intensément et ne pas la laisser s’échapper. Avec vous, les débats sont riches et passionnés. Ensemble, nous progressons sur ce chemin de la connaissance de soi qu’est le voyage et chaque rencontre est un nouveau pavé qui construit notre route.

 

Régulièrement, un sentiment de bonheur intense m’envahit, comme un millier de papillons qui s’envolent dans mon ventre. Je suis heureuse, là, maintenant. Je vis ce bonheur et non dans l’hypothèse qu’il arrive un jour. Dans ces moments, j’essaie de me mettre sur pause pour réaliser ce qui se passe en moi et profiter à fond du moment présent. Le voyage est un merveilleux terrain pour mettre en pratique ce que j’apprends en lisant Le pouvoir du moment présent, d’Eckhart Tolle. Observer la nature, sentir les odeurs et écouter les bruits, comme ce jour où avec Damian, un ami argentin, nous sommes restés un long moment à observer l’eau qui tombe d’une cascade. Comme un spectacle. Me reconnecter avec moi même, avec l’instant, me permet d’être plus apaisée, plus sereine. Je ne m’énerve plus pour un rien et apprend à prendre les choses comme elles viennent. Je sens le changement qui s’opère en moi, lentement…

YO no soy YO. Por lo menos, no soy el mismo YO anterior” Ernesto Che Guevara, juillet 1952

J’ai passé beaucoup de temps à attendre au cours de mon voyage. A attendre des gens, un bateau ou un bus. Parfois quelques minutes, souvent de longues heures, voire plusieurs jours. Mais on ne peut pas dire que je me sois ennuyée. Ces moments d’attente ont été des moments où j’ai pu laissé mon esprit vagabonder, penser librement, faire le point, écrire. Des moments d’inaction, de repos forcé dont il faut savoir profiter pour avancer.

partie de pêche en Amazonie

Avant de partir, je pensais que j’étais heureuse. Mon travail me plaisait, je rencontrais chaque jour des gens intéressants et apprenais beaucoup. J’étais très entourée par ma famille et mes amis. Je vivais avec mes amies dans une ville où je me sentais bien. Aujourd’hui, je me rends compte que ce n’était pas vraiment le cas. Partir a été la meilleure décision que j’ai prise.

Je suis fière de m’être donné les moyens d’en arriver là. Mais le chemin n’a pas été simple. La décision de partir a été difficile à prendre et les mois qui ont précédé le départ, un mélange de longues périodes d’inquiétudes, de peurs infondées et de grandes joies. Comme Pierre Rabhi (Du Sahara aux Cévennes), j’ai eu un projet, « une fenêtre ouverte sur le ciel bleu ». Un but à atteindre qui m’a paru « selon les jours, à portée de main ou inaccessible ».

Aujourd’hui, depuis La Paz, je pense à ma famille et à mes amis qui commencent sérieusement à me manquer. Mais rentrer est impossible. L’objectif est d’aller jusqu’en Colombie par la terre et je dois terminer ce voyage dans lequel je me suis engagée. Si je rentrais maintenant, ce serait comme rester sur quelque chose d’inachevé. Je sens, au fond de moi, que je dois poursuivre mon chemin.

Je pense encore à Pierre Rabhi qui écrit que « notre malheureuse société n’est pas une fatalité mais l’image pétrifiée de notre conscience ». Alors, quels qu’ils soient, croyez en vos rêves et surtout, surtout, réalisez les !

Coucher de soleil en Amazonie

 

2 thoughts on “9 mois sur la route : comment le voyage me transforme”

  1. oye, as tu lu les textes que j’avais deposé sur mon blog durant mon tour du monde?
    je crois que j’ai pas ecris aussi bien mais c’est tres proche. Je m’en rappelle comme si cetait hier… la liberté! etre la ou tu veux quand tu veux. savoir que maintenant personne ne sait ou tu es exactement, peut etre perdue, mais tellement heureuse! Ces papillons dans le ventre, ces heures a attendre… mon dieu que faire un tour du monde sans cocher des cases c’est exactement ca et ca change la vie!
    Sache juste que cela a une fin, et prepare la sur le chemin car le retour est difficile!

    Bonne continuation globe trotteuse! Saches que nous sommes peut nombreux a connaitre cette chance de liberté!
    ou que tu sois je serai toujours pas tres loin!
    Je pense fort a toi!

    gros bisous

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